« SPONTANEOUS COMBUSTION
Antonio Torres Bande
Concert after reading
La Générale, Sèvres
April 7, 2013
I organize a small, once-a-month reading series, L’International, in
Sévres, just outside Paris. Literary in nature, it doesn’t preclude
collaboration between disciplines. Poets, writers and people with
something to say attend and participate. The denizens of La Generale
being indefatigable warriors – at least as far as parties are concerned –
they always wreck the serious nature of the thing with some sort of
post-event extravaganza. On the 7th it was a sauna and a concert by the
Antonio Torres Bande.
The band, conservatory-trained musicians, takes its name from the
great 19th century Spanish guitar maker. They make their own string and
percussion instruments from materials of all kinds, wood they find lying
around. On the 7th they set up in a crowded atelier on the ground
floor, a tight little room with a low ceiling. The musicians, who began
slowly on their handmade guitars, harps, and drums, built slowly into a
crescendo which turned into a barrage of either Holy Noise or just plain
noise, depending on your taste. At the half hour mark, the audience
joined in, banging on whatever was available and singing merrily, with
part of the crowd scantily clad post-sauna. And then something happened.
I don’t know if I can put it into words; a kind of transfiguration, in
which music was no longer a foreign substance, but something we all
contribute to, however awkwardly, innocently. Everyone played, or sang,
or kept time. That was one evening, and only one kind of concert. It was
an intense, communal experience.
The roots of music are shamanistic, libidinous, intensely spiritual – these three define the spirit of music as we feel
it. The music of the academy is listened to from the neck up; the
sounds we turn to in our grief and exaltation we hear with our whole
bodies. Nothing in that impromptu formula precludes structure,
intellect or sophistication. »
« Souvenons nous que brouhaha signifiait précisément bienvenue. Conséquemment nous préférons au terme cacophonie les termes d'habitacle et celui de colle. Nous parlons de colle concernant la cacophonie parce que l'apparition synchronique d'actions à conséquence sonore
appartenant à une même communauté d'action, plutôt que d'intention, est
en effet, strictement au vu de l'objet sonore, une fonction
d'hospitalité qui agrège sans discrimination toute autre action à
conséquence sonore cousine apparaissante. Nous aimons voir surgir cette
propriété dans le cadre d'un mouvement perpétuel,
autrement dit, d'une production qui se constitue immédiatement comme
énergie pour se produire. Nous désignons la concomitance de la colle et
du mouvement perpétuel par spirale magnétique. Et la spirale magnétique est ce que nous nommons fête.
Nous
fabriquons entre autres choses des fêtes. Les fêtes que nous fabriquons sont
des fêtes qui tendent à l'inertie, exactement comme dans une boîte de
nuit où les danseurs produiraient la musique par leur propre danse.
Notre nous est un nous-colle-habitacle-mouvement perpétuel-spirale magnétique-fête.
Las
de nous en tenir à la seule présence locale durable et à toute épreuve,
nous aurons entamé de produire des émeutes domestiques de même
intensité que des guérillas urbaines, autrement dit des choses très très momentanées.
On y casse de la montée verticale, brise des espoirs surmoïques,
arrache le bricolage à la sphère intime du savoir-faire, défonce des
codes de la représentation dans une abstraction générique. Nous ne
parlerons pas de magie,
nous en aurions honte, parce que nos agrégations temporaires sont magie.
Nous produisons avec un nous-colle-habitacle-mouvement
perpétuel-spirale magnétique-fête-émeute domestique-magie : des visites
souterraines, des nivellements par le bas et des incompréhensions
désordonnées qui donneront des
montées en tourbillons verticaux. Nous produisons avec un
nous-colle-habitacle-mouvement perpétuel-spirale magnétique-fête-émeute
domestique-magie-tourbillon vertical : des communions d'actions
autistiques, des échanges de corporéités et des brouillards de bonheur
qui révèleront nos plus puissants élans surmoïques. Nous produisons avec
un nous-colle-habitacle-mouvement perpétuel-spirale
magnétique-fête-émeute domestique-magie-tourbillon vertical-révélateur
de puissants élans surmoïque : la migration des tâches, des percées dans
les genres et des assemblages improductifs qui rendront les savoir-faire au bricolage. Nous produisons avec un
nous-colle-habitacle-mouvement perpétuel-spirale magnétique-fête-émeute
domestique-magie-tourbillon vertical-révélateur de puissants élans
surmoïque-générateur de savoir-faire vite fagotés : des espaces
d'exhibition, les vacances méritées et des permutations de rôles qui
porteront les
codes de la représentation à la pleine incarnation singulière. »
Extrait d'un séminaire AntonioTorresBandeTM,
traduit de situations réelles par Adrien Bardi Bienenstock
« Ce fût un soir de printemps que d’une joyeuse bande nombreuse surgissait distinctement un timbre, le timbre ATB dirais-je, qui trouvait son origine dans la conjonction de la corde en nylon pincée, de la boîte de conserve mise en résonance, du coup de marteau et du micro-contact palpé avec les doigts, et qui était confondant tant il emplissait l’espace sonore et psycho-acoustique uniformément. C’est-à-dire que nous participions à un rugissement collectif, dont la marque de fabrique était le timbre ATB. Je me disais qu’il y avait là quelque chose qui tenait de la responsabilité collective (je ressentais cela de façon très prononcée, comme du temps où je jouais à l’orchestre, à la grande différence que de ce temps il y avait un chef devant pour nous le dire et nous le montrer, et que ce terme de « responsabilité » était innervé par l’idée de « faute ») vis-à-vis de quelque chose de commun : ce quelque chose restait commun. Par moments se tentaient quelques effectuations distinguables, quelques jeux de rôles, modestes et enthousiastes (soliste, accompagnateur, guide, répliqueur ou lanceur de contre-thèmes) ; aussi ces mouvements repérables, l’introduction d’une ligne de basse et d’une mesure par exemple, pouvaient emporter momentanément des champs d’actions en foule et laisser se profiler quelque semblant de bœuf, mais - comme un bœuf gros et gras qui n’aime pas marcher d’un pas cadencé mais préfère l’élégance de l’aléatoire - ce qui se distinguait in fine, c’était ce timbre. Il ne semblait pas faire l’objet d’une volonté de saisie critique, distanciée, ni d’une volonté de formation géométrique, esthétique. Il se localisait par les positions des corps et des objets dans l’espace, se composait de façon plus ou moins dense et compacte, se modulait par inclinations et opérations successives, se pâte-à-modelait. Se découvraient des liens intersticiels, des affinités volumiques et micro-timbrées et une temporalité sujette à l’élasticité des orientations passagères. Concrétion de son qui dit la conjoncture exercée par une joyeuse bande nombreuse. »
Un témoignage de Prune Bécheau, ingénieure en formation ATB